Cinéphile m'était conté ...

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Un tour de magie (Le grand jeu)

Le triangle amoureux est un grand classique de la littérature et du cinéma. Mais entre les mains d'un écrivain aussi subtil que Graham Swift, on passe outre ses passages obligés et ses clichés habituels. La période centrale de Le grand jeu se situe à Brighton, à l'été 1959. Avec une atmosphère balnéaire délicieusement surannée et un spectacle de variétés assuré par trois artistes, dont un magicien. Comme dans Le dimanche des mères, les événements cruciaux dans la vie des membres de ce trio sont vus rétrospectivement, 50 ans plus tard, en l’occurrence, quand ne reste plus qu'un des protagonistes, avec ses souvenirs. Alors que des romanciers adoptent le plus souvent des récits alternés, Swift fait lui le choix d'enchevêtrer les temporalités, évoquant tour à tour ses trois personnages principaux jusqu'à leur enfance, laissant planer le mystère jusqu'au bout, sur le sort de l'un d'entre eux. La fluidité narrative du livre est fascinante et sa finesse psychologique éblouissante, ne négligeant pas certains rôles secondaires et nous faisant remonter, pour un temps, jusqu'à la seconde guerre mondiale, voire la première. Il y a constamment un suspense un peu brumeux qui tient en haleine dans Le grand jeu, une sorte de flou qui rappelle, toutes proportions gardées, l'ambiance vaporeuse et floue de certains Modiano. Et quand l'auteur revient à Brighton 59, à ce moment précis où les trois héros du livre jouent leur destin, Swift le prestidigitateur sort non pas une colombe mais un perroquet de son chapeau. Un tour de magie ou une illusion parfaite, quelle que soit l'expression choisie, on ne peut que s'incliner. Applaudissements !

 

 

L'auteur :

 

Graham Swift est né le 4 mai 1949 à Londres. Il a publié 11 romans dont La lumière du jour et Le dimanche des mères.

 



21/01/2021
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