Métal hurlant (D'acier)
Elle est dans quel état ces derniers mois Silvia Avallone ? Euphorique ou dépassée par les événements ? Elle est passée de l'anonymat à la célébrité, à 25 ans, après la parution de son premier roman en Italie, plébiscité par le public (plus de 350 000 exemplaires), encensé par la plupart des critiques, descendu avec hargne par les autres, en voie d'être adapté au cinéma, traduit dans douze pays. Et avec cette référence évidente et lourde à porter : l'Emile Zola de Germinal. D'acier est sorti en France en mars, a obtenu le Prix des lecteurs de l'Express. En attendant d'autres récompenses, sans doute. Ce livre n'est pas une gifle, c'est un crochet dans l'abdomen. A couper le
souffle. De multiples personnages s'y côtoient dans une même ville : Piombino, en Toscane, en bord de mer. Le paradis ? L'enfer plutôt. C'est une ville industrielle dominée par une aciérie et son haut fourneau, avec les immeubles de sa cité de béton, poétiquement appelée Stalingrado. Avallone raconte le quotidien des ouvriers et de leurs familles, au début du XXIe siècle. Les femmes flétries à 30 ans, les hommes violents et alcooliques, certains déjà pères à 18. Et les magouilles pour gagner un peu de fric, la cocaïne pour tenir à l'usine le jour et passer la nuit dans des boîtes de nuit glauques. Tout un univers, couleur de rouille, dans lequel évoluent deux gamines, pas encore quatorze ans, belles comme des icônes, que leur seule amitié fait tenir. La romancière ne fait pas dans la dentelle : langage de charretier, style scandé, crudité à tous les étages. Du réalisme social
au goût marécageux qui n'épargne personne, avec une énergie inimaginable. Comme pour Zola en son temps, on pourrait la taxer de vulgarité, trouver qu'elle en fait trop, qu'elle en rajoute dans le
sordide. C'est un point de vue qui se défend, mais qui ne résiste pas à la puissance d'évocation de ce roman, à la construction linéaire et implacable, qui ne lâche jamais prise. Un bouquin en fusion qui brûle au troisième degré. Métal hurlant !
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