Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

L'exilé paranoïaque (L'homme apprivoisé)

Erasmo Aragón, le sombre héros de L'homme apprivoisé, est au comble de l'anxiété, en dépit des médicaments qu'il ingurgite docilement. Faussement accusé d’abus sexuel. Il a perdu son travail dans une université américaine et a suivi en Suède une infirmière, laquelle constitue sa seule bouée de sauvetage. Bien qu'écrit à la troisième personne, le livre du Salvadorien Horacio Castellanos Moya semble l'être à la première, tellement l'auteur nous fait ressentir viscéralement l'angoisse d'Erasmo, sa paranoïa galopante, son délire de la persécution et, cerise sur la dépression, ses grotesques bouffées de fantasmes sexuels. Les phrases sont courtes et incisives, le présent est le temps de la narration et l'atmosphère opaque comme dans un roman noir. Erasmo est un homme apprivoisé mais surtout intérieurement détruit et son quotidien se nourrit de peurs constantes et de brefs intermèdes d'euphorie. C'est un livre qui évoque le statut d'un exilé, inadapté à son nouvel environnement, conté avec une folle intensité et un sens aigu de la description de la déréliction mentale. Au point d'atteindre un tel niveau d'absurde qu'il peut susciter quelques sourires chez le lecteur, en guise de protection. Le roman est trop court et sa fin brutale mais il est haletant et accrocheur en diable, de par sa vivacité paradoxale, à propos d'un individu apathique à l'extérieur, mais luttant comme un damné pour ne pas sombrer, ce en quoi il ne peut que nous émouvoir, nous autres humains et grands malades que nous sommes, presque tous.

 

Remerciements aux éditions Métailié et à NetGalley.

 

 

L'auteur :

 

Horacio Castellanos Moya est né le 21 novembre 1957 à Tegucigalpa (Honduras). Il a publié une vingtaine de livres dont Le Dégoût, Effondrement et Moronga.

 

 



18/05/2023
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