L'étoffe des héroïnes (Les figures de l'ombre)
L'on se plaint assez que la majorité des films contemporains souffre de scénarios étiques pour ne pas se réjouir que Les figures de l'ombre en possède un, solide, qui revisite la conquête spatiale américaine en mettant à l'honneur des femmes, noires, qui ont contribué à ce que l'Amérique triomphe malgré la concurrence soviétique. Car c'est bien de cela dont il s'agit, comme souvent a t-on envie de dire avec le cinéma hollywoodien, montrer que malgré les divisions et les inégalités, l'Oncle Sam gagne toujours. Le film s'appuie sur la réalité historique qu'il utilise pour un propos certes utile, y compris aujourd'hui, aussi bien pour la cause noire que féministe, mais en usant de ficelles parfois un peu épaisses heureusement adoucies par quelques traits d'humour. On est somme toute dans une sorte de conte de fées dont les héroïnes sont des parangons de perfection, y compris dans leur vie privée, qui doivent abattre les murs de l'incompréhension, de la bêtise et de la discrimination. Certaines scènes poussent le bouchon un peu loin en ce sens, notamment celles des démonstrations mathématiques, totalement incompréhensibles au commun des mortels, qui laissent bouche bée les scientifiques blancs et mâles de la Nasa. C'est très efficace et jouissif lors de la première séance, nettement moins lorsqu'elle se répète à plusieurs reprises. Globalement, la mise en scène de Theodore Melfi est lisse et sans plis, incapable de donner la moindre ampleur à une action qui se résume à un aller/retour permanent entre la Nasa et les foyers de ces femmes remarquables (par le biais de simples vignettes académiques). Quel dommage de ne sentir que l'étoffe de ces héroïnes dont la personnalité reste tellement peu creusée. Et ce, alors que l'interprétation est pour le moins excellente ! Les figures de l'ombre, dans son allure de feel good movie et avec son militantisme soft, est un film plutôt sympathique, parce que les faits qu'il relate et l'hommage à ces femmes méritent ô combien d'être enfin mis en lumière. Mais du point de vue cinématographique, c'est franchement une oeuvrette dont le didactisme et la volonté de tout souligner de façon scolaire sont irritantes.
Classement 2017 : 28/54
Le réalisateur :
Theodore Melfi est né en 1971 à Brooklyn. Il a réalisé St Vincent.
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