Cinéphile m'était conté ...

Du fil à retordre, c'est comme un film de Ken Loach, en beaucoup cru, avec un humour ravageur pour surmonter la dureté des temps, en pleine guerre civile. Le roman de Michelle Gallen se déroule durant l'été 1994, en Irlande du Nord, une période où les bombes, qu'elles soient protestantes ou catholiques, ne cessent d'exploser et de tuer. Et pourtant, la vie continue, il le faut bien, et elle ne fait même que commencer pour la jeune Maeve et ses deux amies, qui ont dégotté un travail provisoire dans l'usine de confection locale, en attendant les résultats des examens de fin d'année scolaire et leur envol vers d'autres rivages, peut-être même londoniens, pour une nouvelle vie loin de l'atmosphère mortifère de leur petite ville. Le roman, qui risque fort de se trouver adapté au cinéma à l'avenir, commence à tout berzingue, grâce à des dialogues décapants et au caractère bien trempé de Maeve, qui a aussi ses fragilités, c'est pour cela qu'on l'adore, y compris lorsqu'elle se trouve en présence de son patron, anglais bon teint au tempérament d'esclavagiste, qu'elle déteste autant qu'il l'a fait fondre, allez comprendre ! Dans une langue à faire rougir une rosière (chapeau à la traductrice, Carine Chichereau), Michelle Gallen rend épique les aventures de Maeve et de ses copines, au milieu des ouvrières de confessions antagonistes, sans jamais oublier le contexte bouillant, dans un combat engagé pour dépasser le déterminisme social et faire la nique, entreprise encore plus difficile, au patriarcat tout-puissant. Y aura t-il une suite à Du fil à retordre ? Ce serait dans l'ordre des choses, eu égard aux dernières lignes du livre, et sans doute que ce serait le désir de la majorité des lecteurs mais l'autrice décidera et, de toutes manières, après un tel roman, impossible de ne pas la suivre dans le futur, que l'action se situe à Dublin, Londres, encore en Irlande du Nord et jusqu'au bout du monde.

L'auteure :

Michelle Gallen est née à Castlederg (Irlande du Nord). Elle a publié Ce que Majella n'aimait pas.