Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Des résistants indomptés (Inés et la joie)

Avec son énorme pavé, Le coeur glacé, il était légitime de penser que Almudena Grandes en avait terminé avec le guerre civile espagnole et qu'elle allait passer à autre chose. Inés et la joie, d'une longueur plus modeste (760 pages, seulement !), revient pourtant sur cette période et la romancière annonce que 5 autres livres vont suivre, tous relatifs, d'une façon ou d'une autre, à ce traumatisme indélébile de l'histoire espagnole. Moins abouti, plus délayé que son oeuvre précédente, Inés et la joie a le mérite d'évoquer un épisode méconnu, y compris de l'autre côté des Pyrénées, une expédition donquichottesque menée en octobre 44, par une poignée de membres du parti communiste espagnol, avec le but ultime de reconquérir le pouvoir, avec l'aide des Alliés et de la population locale. Un véritable fiasco, en définitive, due en partie à l'incurie du PCE, dont les leaders étaient alors basés à Moscou. Almudena Grandes mêle la grande histoire et la petite dans une construction astucieuse, un peu lourde, parfois, où le didactisme le dispute au romanesque avec un sens du détail impressionnant. Si elle n'est pas l'héroïne du livre, Dolores Ibárruri Gómez, dite La Pasionaria, y occupe une place de choix, chef communiste pateline et charismatique, admirée aussi bien par Staline que par ... Franco. Au-delà des faits avérés, Almudena Grandes a imaginé une fiction qui lui permet non seulement de relater cette "invasion' ratée, mais aussi de s'attarder sur la vie des clandestins en mission dans l'Espagne franquiste et des républicains en exil à Toulouse. Galan et Ines, ses deux personnages principaux, liés par un amour immense, prennent alternativement la parole et racontent leur quotidien : avant, pendant et après ce fameux mois d'octobre 1944. Des vies abîmées, des âmes cabossés, des résistants indomptés, jusqu'à la mort du caudillo. Une fresque ambitieuse, sentimentale, gastronomique (il y est énormément question de cuisine) et politique qui aurait tout aussi bien pu s'appeler Inés et la souffrance. Malgré des longueurs certaines, ce livre confirme le talent de Grandes à assaisonner élans du coeur et défis à la mort, au service d'un objectif noble : la reconquête de la liberté et de la dignité.

 




21/04/2012
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