Cinéphile m'était conté ...

Cinéphile m'était conté ...

Cinemed m'était conté (5)

 

Mon périple se poursuit entre l'Algérie, la France et le le Liban.

 

Rêve (Argu), Omar Belkacemi

Présenté au Cinemed 2021, Rêve de l'algérien Omar Belkacemi n'est pas encore référencé sur IMDB, le réalisateur n'apparaissant que pour son court-métrage La vague, qui date de 2015. C'est donc une avant-première mondiale à laquelle a assisté le public du festival de Montpellier. Même s'il appartient à la fiction, le film se situe à un carrefour entre documentaire, essai philosophique sur la liberté et élégie de la nature. Situé dans un petit village de montagne, Rêve s'attache à un personnage de "fou" ou étiqueté par les hommes de la communauté qui le trouvent trop "différent" tandis que son frère, professeur de philosophie à Alger, essaie de plaider sa cause. La narration est très lâche, ayant du mal à convaincre, s'évadant sans cesse d'un récit que le réalisateur a voulu diffus et ouvert à une liberté de ton, certes appréciable, mais qui détourne l'attention, alors même que certaines scènes fortes (un suicide) ne débouchent sur rien d'autre. Cette balade en altitude, loin d'être désagréable, ne parvient cependant pas à devenir mémorable.

 

Les choses humaines d'Yvan Attal, sortie le 1er décembre

Les choses humaines, le roman de Karine Tuil paru en 2019, figure parmi les plus brillants de son auteure, ne se contentant pas de décrire une affaire de viol, dans l'époque post #MeToo, en s'attachant à des personnages complexes, dont l'origine sociale et les liens familiaux sont autant d'éléments approfondis. Bien que globalement fidèle au livre, l'adaptation d'Yvan Attal n'a évidemment pas le temps d'y consacrer autant de temps et, sans être bâclés, les portraits du supposé violeur et de sa victime sont trop rapides et imparfaits, voire même "scolaires", à cause d'une mise en scène sans trop d'éclat. Comme dans le roman, le film fait pourtant la part belle aux scènes de tribunal, avec la volonté de nous faire balancer entre les deux protagonistes, dans l'impossible quête de la vérité, le suspense classique rejoignant celui d'un film comme La fille au bracelet, dont la réalisation était plus probante, avec ses inévitables zones grises. Qui ne dit mot consent ou bien qui se tait subit ? La question est centrale dans le film et, à son crédit, Attal a bien raison de nous exposer tous les dégâts collatéraux dans ce type d'affaires. Le réalisateur, qui excelle depuis ses débuts dans la comédie, brûlait de se colleter à un drame et rêvait d'un film de procès, à la manière de l'un de ses cinéaste favoris, Sidney Lumet. Dans Les choses humaines, il ne démérite pas et ceux qui n'ont pas lu le livre y trouveront certainement leur compte. Mais pour les autres, il manquera sans doute de l'étoffe, de la densité et de la fluidité dans cette adaptation.

 

Costa Brava, Lebanon de Mounia Akl

Conçu à son écriture comme une dystopie, évoquant le Liban de 2030, le premier long-métrage de Mounia Akl, Costa Brava, Lebanon (drôle de titre !) a été rattrapé par la réalité de l'actualité, plus terrible que ce prévoyait le scénario du film. L'histoire, celle d'une famille isolée dans les montagnes pour fuir la pollution urbaine et la corruption, fonctionne comme une métaphore de la désintégration d'un pays qui se déchire et souffre mille maux. Nombreuses sont les disputes entre le père, la mère, une grand-mère, une adolescente et une fillette, soudainement confrontés à l'installation d'une immense décharge à proximité de leur propriété. Le film alterne conflits et moments de tendresse dans cette famille où chacun de ses membres est doté d'une très forte personnalité, y compris la benjamine, peut-être le personnage le plus sensé de tous. L'allégorie avec la situation dramatique du Liban n'est pas toujours des plus subtiles mais la mise en scène corrige les fautes de goût, avec une fluidité et une élégance qui font mouche. Même remarque pour la direction d'acteurs, parfaite, avec notamment Nadine Labaki dans un rôle polymorphe qu'elle tient sans faillir. Au final, même si le récit se veut plus tragique que comique, ce sont les instants les plus aériens, poétiques ou drôles et moins démonstratifs que l'on retient, preuves que la néo-cinéaste ne manque pas de cordes à son arc.

 



23/10/2021
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